A Paris, il y a aujourd’hui 67 ans, les États membres des Nations Unies ont affirmé que «Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits». Ce 1er article de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (DUDH) a entériné ce principe fondamental des droits de l’Homme dans la prescience apparente de sa pertinence contemporaine. À la lumière des différents courants et tendances actuels qui entravent la mise en œuvre de ce principe, en tant qu’acteurs et actrices civil-e-s à travers le monde, nous réaffirmons que «la reconnaissance de la dignité inhérente et des droits égaux et inaliénables de tou-t-es les intégrant-e-s de la famille humaine est le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde».

2015 Human Rights Day: call for the inclusion of the Right to the City in Habitat III

Néanmoins, en contrecarrant les efforts menés en vue du bien-être humain durable, l’inégalité, l’accumulation de la terre et des ressources par la dépossession et la violation systématique des droits de l’Homme qui persistent en toute impunité et, souvent, avec la complicité de ces mêmes états qui se sont tous engagés à mettre en œuvre ces normes coutumières se développent de plus en plus.

La prise de conscience du fait que nous sommes tous un est de plus en plus claire et plus urgente à la lumière d’une catastrophe écologique d’origine humaine qui se profile, même lorsque les États membres de l’ONU se réunissent de nouveau à Paris pour la COP21 afin de faire face au changement climatique, l’autre défi épique. Ces décideurs doivent trouver le courage d’aborder et de résoudre les causes qui en sont la racine.

Cette année a aussi été, pour les états, l’année de l’approbation des objectifs de développement durable, qui visent à réaliser les droits de tous et toutes et d’atteindre l’égalité de genre. Ces objectifs sont essentiels et indivisibles et intègrent les trois dimensions du développement durable: l’économique, la sociale et l’environnementale. Il reste à voir si les Etats vont mobiliser la volonté politique nécessaire pour lutter contre la discrimination et la pauvreté globale et, ainsi, s’acquitter des obligations individuelles et collectives auxquelles ils sont tenus. En attendant, la lutte contre la discrimination et la pauvreté demeure essentiellement une tâche locale que nous nous engageons à mener, malgré la complaisance des fonctionnaires et des dirigeant-e-s politiques. Pendant ce temps, les discussions mondiales et les programmes ultérieurs donnent trop d’importance à la dimension économique de leurs responsabilités et de leurs engagements. On consacre beaucoup de temps à la formulation, peu de ressources sont disponibles pour éradiquer la pauvreté, s’attaquer à la discrimination et aux causes profondes des catastrophes et du changement climatique que l’Homme provoque.

Alors que Habitat III s’approche, la Conférence des Nations Unies sur le logement et le développement urbain durable qui aura lieu à Quito, en Équateur, en Octobre 2016, nous observons avec une grande inquiétude l’abandon de l’approche des Droits de l’Homme et l’éclipse du développement équilibré urbain-rural très nécessaire pour tous et toutes dans le contenu et le processus d’HIII, et son aiguillage vers des modèles d’urbanisation et de croissance qui ont déjà démontré leur incapacité à répondre aux questions fondamentales touchant aux droits de l’Habitat. Il est inutile de mentionner que la cause de cette inégalité croissante est précisément cette tendance à la croissance et à l’urbanisation, l’accumulation subséquente de la richesse et l’inadéquation des mécanismes pour redistribuer les richesses et assurer la réduction de la pauvreté. Mais il est impossible de résoudre les problèmes en en exacerbant les causes profondes, tout en combinant cette fois la discrimination avec la progression du changement climatique car cela provoquera un déplacement plus important, une urbanisation sans fin et la création de «villes apartheid», générant ainsi davantage de catastrophes foncières et climatiques dans toutes les régions.

A travers le monde, les personnes et les communautés restent vulnérables à la discrimination persistante qui nie et viole leur droit à un logement convenable et droits relatifs -y compris, entre autres, les droits à la terre, à l’alimentation, à l’eau, à la santé, à la participation et au travail décent- essentiels pour assurer leur subsistance et leur survie. La discrimination et ses idéologies euphémisent souvent l’économie axée sur le marché, les projets destructeurs, le patriarcat, l’investissement opportuniste et l’urbanisation inéquitable, lesquels s’articulent de différentes façons pour dévaster les communautés et leurs environnements. La discrimination et son manifeste logique des expulsions forcées des citadin-e-s appauvri-e-s; la négation de l’accès des communautés pastorales aux ressources naturelles vitales; l’usurpation des terres des fermier-re-s et des paysan-ne-s; l’échec à mettre en œuvre la réforme agraire et à investir suffisamment dans le développement rural; le déni des droits des femmes au logement, à la terre, à l’héritage et à la propriété; le déplacement et le replacement des peuples indigènes; une plus importante marginalisation des minorités; l’exclusion systématique des communautés sur la base de leur origine et de leur travail; destruction injustifiée dans le contexte d’un conflit, de l’occupation et de la guerre; et le dépouillement des peuples et de nations entières qui vivent sous occupation et sous autres formes comparables de violence et de domination étrangères.

Les formes contemporaines de discrimination se sont combinées à un ensemble de facteurs historiques qui conduisent aux violations des droits au logement et à la terre: les paradigmes d’exclusion du développement; la négation de la sécurité de tenure; l’absence de reconnaissance juridique des droits collectifs à la terre et aux autres ressources naturelles; le déclin de l’aide publique au logement; l’accès restreint au crédit; la croissance des mafias et des cartels fonciers; la privatisation des services de base; et les prêts hypothécaires prédateurs et «subprime»; la différence entre les droits de «nationalité» et ceux de «citoyenneté»; les obstacles à la participation effective; et un manque de protection juridique efficace contre la discrimination opérée par les acteurs privés et publics. Un «ethos de privatisme» dominant dans la vie économique soumet de façon croissante l’accès au logement adéquat et à la terre à la concurrence sur le revenu, ce qui génère de nouvelles formes de discrimination. Ceci est inacceptable, spécifiquement à la lumière de l’obligation des États de respecter, protéger et réaliser le droit de l’Homme au logement adéquat.

D’autre part, nous observons comment les programmes mondiaux limitent la participation des acteurs de la société civile. Leur participation a été plus importante pour l’élaboration de l’Agenda Habitat II que ce qui est actuellement permis pour la rédaction de l’Agenda d’Habitat III actuelle. La diversité des points de vue, -y compris la mention des engagements en suspens- n’est pas autorisée, notamment ceux qui soulignent et/ou contredisent la restriction du Programme pour l’Habitat et du concept inclusif (affirmé en trois opportunités, 1976, 1996 et 2001). Les fonctionnaires du Secrétariat d’ONU-Habitat /d’Habitat III ou leurs partisans ne font nullement mention de ces antécédents. Il nous faut adhérer à la supervision amnésique d’ONU-Habitat en faisant serment d’allégeance au nouvel agenda « urbain » de remplacement.

Cette période devrait permettre la liberté d’expression suffisante pour envisager jusqu’à la réforme d’ONU-Habitat afin de le faire fonctionner de manière cohérente avec les trois dimensions éloquentes (piliers) de la Charte des Nations Unies: la paix et la sécurité, les progrès du développement et les droits de l’Homme, ceints par le biais de la coopération internationale. En 1948, la DUDH a également reconnu que «la méconnaissance et le mépris des droits de l’Homme ont conduit à des actes de barbarie qui révoltent la conscience de l’humanité», elle a également proclamé «l’avènement d’un monde où les êtres humains seront libres de parler et de croire, libérés de la terreur et de la misère… comme la plus haute aspiration de l’homme».

En cette Journée des Droits de l’Homme, Habitat International Coalition (HIC) fait écho à l’appel «aux droits égaux pour les hommes et les femmes et … à promouvoir le progrès social et de meilleures conditions de vie dans une plus grande liberté». De même, nous devons aussi sonner l’alarme contre le modèle implacable de violations en matière de droits au logement et à la terre qui indique la discrimination endémique dans toutes les régions, et la nécessité de respecter l’approche préventive et corrective des droits de l’Homme dans le processus d’Habitat III et au-delà.

Pour plus d’information sur le travail de HIC, visitez: www.hic-gs.org/ , www.hlrn.org/, www.hlrn.org.in/, www.hic-mena.org et www.hic-al.org/

Pour plus d’information sur la Journée des droits de l’homme 2015, visitez:http://www.ohchr.org/FR/NewsEvents/HRDay2015/Pages/HRD2015.aspx

HIC GS HLRN 10 décembre 2015

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